Depuis 2024, la Thaïlande met en place une série de réformes fiscales visant à mieux encadrer la situation des travailleurs étrangers. Ces nouvelles règles fiscales pour les travailleurs étrangers marquent une volonté claire du gouvernement d’harmoniser la fiscalité locale avec les standards internationaux, tout en limitant les abus liés à l’évasion fiscale.
Selon les autorités, cette réforme n’a pas pour objectif de décourager les talents étrangers, mais plutôt de renforcer la transparence et d’assurer une contribution équitable au système fiscal thaïlandais.
À découvrir :
- Contexte et raisons du durcissement fiscal
- Ce que changent les nouvelles règles fiscales pour les travailleurs étrangers
- Conséquences pour les expatriés et travailleurs étrangers
Contexte et raisons du durcissement fiscal
Ces dernières années, le nombre d’expatriés travaillant en Thaïlande a considérablement augmenté (plus de 3,3 millions selon les dernières données), notamment dans les secteurs de la technologie, du tourisme, de l’éducation et de la finance. Cependant, une part importante de ces professionnels exerçait leur activité via des structures offshore, ou déclarait des revenus à l’étranger afin d’éviter l’imposition locale. Le ministère des Finances a donc annoncé une nouvelle série de directives visant à limiter ces pratiques et à mieux identifier les résidents fiscaux réels.
L’objectif : plus de transparence et d’équité
Le gouvernement thaïlandais souhaite s’assurer que toute personne travaillant ou percevant des revenus depuis la Thaïlande contribue équitablement au système fiscal du pays. Ce durcissement des règles s’inscrit également dans le cadre d’une coopération accrue avec les organismes internationaux, notamment l’OCDE, en matière d’échange automatique d’informations financières.
Ce que changent les nouvelles règles fiscales pour les travailleurs étrangers
1. Une définition plus stricte du statut de résident fiscal
Selon la loi thaïlandaise, la règle est étonnamment simple, agissant comme un interrupteur binaire :
- Si vous résidez dans le pays pour 180 jours ou plus au cours d’une année civile, vous êtes considéré comme un résident fiscal.
- Si vous restez moins de 180 jours, vous êtes un non-résident.
Un non-résident est uniquement imposé sur les revenus provenant de Thaïlande. En revanche, un résident fiscal a des obligations bien plus étendues, notamment en raison du changement majeur que nous allons explorer.
2. La nouvelle règle
Désormais, la loi exige que les résidents fiscaux (ceux qui restent 180 jours ou plus) déclarent et paient l’impôt sur tout revenu étranger rapatrié en Thaïlande, peu importe l’année où ce revenu a été gagné et quelle que soit leur nature (salaire, dividendes, gains en capital, etc.).
Avant cette date, la règle était plus indulgente : un revenu étranger n’était imposable en Thaïlande que s’il était rapatrié au cours de la même année civile où il était gagné. C’était une faille, ou du moins une zone grise, que beaucoup utilisaient.
- Ancienne Règle : Revenu étranger gagné en 2020 et rapatrié en 2021 = Non imposable.
- Nouvelle Règle (depuis Janvier 2024) : Revenu étranger gagné en 2020 et rapatrié en 2025 = Imposable en Thaïlande en 2025.
3. Une obligation accrue de transparence bancaire
Les autorités fiscales thaïlandaises collaborent désormais avec les banques locales et internationales afin de repérer les transferts suspects et d’identifier les flux financiers entrants liés à des activités professionnelles.
Les expatriés devront ainsi justifier l’origine des fonds transférés en Thaïlande, sous peine d’amendes et de sanctions administratives.
Qui est concerné par ces nouvelles règles ?
Les nouvelles règles fiscales pour les travailleurs étrangers concernent plusieurs profils :
- Les expatriés vivant et travaillant à plein temps en Thaïlande ;
- Les nomades digitaux ou télétravailleurs opérant depuis le pays pour des entreprises étrangères ;
- Les investisseurs étrangers rapatriant des dividendes ou des plus-values ;
- Les salariés détachés percevant une partie de leur rémunération à l’étranger.
Les retraités détenteurs de visas non-immigrant O ou O-A ne sont pas directement visés par ces nouvelles mesures, sauf s’ils exercent une activité génératrice de revenus depuis le territoire.
Conséquences pour les expatriés et travailleurs étrangers
Le système d’impôt sur le revenu en Thaïlande est, par nature, progressif. Cela signifie que, comme une échelle, plus votre revenu net est élevé, plus le pourcentage d’impôt appliqué à la tranche supérieure de ce revenu augmente. C’est un système qui nous est familier dans la plupart des pays du monde. Actuellement, les tranches de l’impôt sur le revenu thaïlandais varient d’un taux de 0% à 35%. Les taux actuels s’appliquent au revenu net (après déductions et abattements) :
Revenu Net Annuel (Baht) | Taux d’Imposition |
0 – 150 000 | Exempt d’impôt (0%) |
150 001 – 300 000 | 5% |
300 001 – 500 000 | 10% |
500 001 – 750 000 | 15% |
750 001 – 1 000 000 | 20% |
1 000 001 – 2 000 000 | 25% |
2 000 001 – 5 000 000 | 30% |
Plus de 5 000 000 | 35% |
Il est important de noter que même si le revenu net est exempté d’impôt (inférieur à 150 000 bahts), 53 faut tout de même le déclarer au Département du Revenu. C’est une obligation formelle à ne pas négliger.
Abattements et Déductions
Les ressortissants étrangers sont éligibles à bon nombre des mêmes déductions et abattements que les citoyens thaïlandais, notamment : :
- Allocation personnelle : 60 000 bahts.
- Déductions pour conjoint et enfants (soumises à certaines conditions).
- Allègements pour les cotisations à des fonds de prévoyance ou à une assurance-vie.
Conventions de Double Imposition (Double Tax Agreements ou DTA)
Les DTA sont des traités entre la Thaïlande et d’autres pays destinés à éviter la double imposition sur les mêmes revenus, ce qui peut se produire lorsqu’une personne ou une entité gagne des revenus à travers les frontières nationales. Ces accords définissent quel pays a le droit d’imposer certains types de revenus et prévoient des mécanismes tels que des crédits d’impôt pour éviter la double imposition.
- Retenues à la Source : Les DTA réduisent souvent les impôts retenus sur les paiements effectués à travers les frontières, tels que les dividendes, les intérêts et les redevances.
- Résidence Fiscale : Les DTA fournissent des règles pour déterminer le pays de résidence fiscale d’un contribuable.
- Élimination de la Double Imposition : Les méthodes incluent la méthode de l’exemption (revenus imposés dans un seul pays) et la méthode du crédit (crédits pour les impôts payés dans un pays contre les impôts dus dans un autre).
Pays ayant des DTA avec la Thaïlande
Armenie, Australie, Autriche, Bahreïn, Bangladesh, Bélarus, Belgique, Bulgarie, Cambodge, Canada, Chili, Chine (République Populaire), Chypre, Tchéquie, Danemark, Estonie, Finlande, France, Allemagne, Hong Kong, Hongrie, Inde, Indonésie, Irlande, Israël, Italie, Japon, Corée, Koweït, Laos, Luxembourg, Malaisie, Maurice, Népal, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Norvège, Oman, Pakistan, Philippines, Pologne, Roumanie, Russie, Seychelles, Singapour, Slovénie, Afrique du Sud, Espagne, Sri Lanka, Suède, Suisse, Taïwan, Tadjikistan, Turquie, Ukraine, Émirats Arabes Unis, Royaume-Uni, États-Unis d’Amérique, Ouzbékistan, Vietnam.
Autres obligations financières à prévoir
Les tant que travailleurs légaux sont également tenus de contribuer au système de Sécurité Sociale thaïlandais.
- Taux de Contribution : 5% du salaire mensuel. (Retenue à la source gérée par l’employeur.)
- Plafond : La déduction est plafonnée à 750 bahts par mois.
TVA et Impôts Spécifiques aux Entreprises
Pour ceux qui gèrent leur propre entreprise en Thaïlande, des obligations supplémentaires s’ajoutent :
- TVA : Inscription obligatoire si le chiffre d’affaires annuel dépasse 1,8 million de bahts.
- Taxes Spécifiques : Certains secteurs, comme la finance ou la location de biens immobiliers, sont assujettis à des taxes professionnelles spécifiques.
Déclaration Fiscale Annuelle
Chaque année, le rituel de la déclaration fiscale est un rendez-vous à ne pas manquer. La date butoir est fixée au 31 mars de l’année suivant l’exercice fiscal. Par exemple, pour les revenus de l’année 2025, il faut faire la déclaration avant le 31 mars 2026.
- Formulaire PND 90 : Pour les personnes ayant des sources de revenus complexes ou diverses.
- Formulaire PND 91 : Généralement pour les employés salariés avec des sources de revenus plus simples.
Soumettre ces formulaires à temps est essentiel. Le retard, ou pire, la non-conformité, peut entraîner des amendes substantielles, voire des peines d’emprisonnement.
Une planification fiscale plus complexe
Avec ces nouvelles règles, il devient crucial pour tout travailleur étranger de planifier sa fiscalité. Les doubles impositions sont possibles, notamment pour ceux originaires de pays n’ayant pas signé de convention fiscale avec la Thaïlande.
Une mauvaise déclaration ou un oubli pourrait entraîner des amendes importantes et, dans certains cas, la révocation du visa de travail.
Une réforme dans un contexte de modernisation fiscale
La réforme s’inscrit dans un effort global de digitalisation de l’administration fiscale en Thaïlande.
D’ici 2026, toutes les déclarations d’impôts seront dématérialisées, et les vérifications automatisées permettront de croiser les données issues des banques et des plateformes de transfert d’argent.
À court terme, le durcissement fiscal pourrait freiner l’installation de certains télétravailleurs étrangers.
Mais à moyen terme, cette réforme vise à renforcer la crédibilité du système fiscal thaïlandais et à rassurer les investisseurs internationaux.
Une meilleure transparence et une application équitable de la loi devraient contribuer à l’image d’un pays plus stable et conforme aux normes internationales.